Vous avez déjà lu deux articles sur les enchères dites propositionnelles. Si vous ne les avez plus en mémoire, relisez-les !
Les enchères propositionnelles du premier type, qui donnent le choix à l’ouvreur entre passe et la manche, sont encore appelées enchères limites ou limit-bids. Nous ne parlerons que des enchères limites qui suivent une ouverture de 1 à la couleur.
1°) Vous avez un fit : Par exemple, votre partenaire a ouvert d’1♠, et vous découvrez la main ci-contre. Vous n’avez pas beaucoup de points d’honneurs (points H), mais vous avez un beau fit, qui permet de revaloriser votre jeu, et vous atteignez 11 points en honneurs-longueur-distribution (HLD ; H = 8, L = 0, doubleton = 1, 9ème atout = 2). Vous voyez que si l’ouvreur, votre partenaire, a ouvert avec une main minimum, par exemple : ♠AV543 ♥RV5 ♦1093 ♣R4, les chances de gagner 4♠ sont très faibles. Avec une ou deux cartes manquantes bien placées, vous pourriez gagner 3♠, mais c’est le « bout du monde ». En revanche, si votre partenaire était un peu au-dessus du minimum de son ouverture, disons 3 ou 4 points de plus, la manche devient une perspective intéressante (l’ouvreur aurait, par exemple : ♠AV543 ♥RV5 ♦D103 ♣A4). La manche peut être gagnée avec plus de 50% de chances, ce qui vaut le coup d’être tenté. Pour que le partenaire puisse prendre la bonne décision, il convient de lui donner la force de votre main de la façon la plus précise possible.
Et il est important, pour que l’ouvreur puisse faire l’addition des points et la comparer à la table de décision, que la précision donnée soit à UN point près. Or, lorsque le répondant a lui même l’ouverture, il faut toujours demander la manche (vieil adage : ouverture + ouverture = manche). On la demanderait donc directement : 4♠ si l’on avait 13 à 17 points HLD. Dans le cas présent, nous sommes en dessous, avec nos 11 points HLD. Pour lui dire qu’il y a peut-être une manche s’il n’est pas minimum, on peut lui faire l’enchère propositionnelle (enchère limite) de 3♠, qui est juste au dessous, mais doit rester à 1 point près, donc il faut posséder exactement 11 ou 12 points HLD. On en déduit l’échelle des réponses fittées :
– 0 à 5 HLD : Passe.
– 6 à 10 HLD : 2 dans la couleur de l’ouverture, ici 2♠.
– 11 ou 12 HLD exactement : 3 dans la couleur d’ouverture (limit-bid) : ici 3♠, enchère à saut (non forcing).
– 13 à 17 HLD : 4 dans la couleur d’ouverture majeure (pour les mineures, attention à ne pas dépasser 3SA).
2°) Vous vous orientez vers SA, après une redemande de l’ouvreur à 1SA : vous avez répondu 1♠ à l’ouverture de 1♣ de votre partenaire, et il redemande à 1SA. Il n’a donc pas le fit, et exactement 12 à 14H (voire 15HL. Rappel : avec 15 à 17H, il aurait ouvert d’1SA). Vous avez vous-même 11HL (H = 11, L = 0). Vous voyez que si l’ouvreur a 14H (ou 15HL), il faut joueur 3SA. Si au contraire, il est minimum, il faudrait jouer un contrat partiel. Vous lui faites donc l’enchère limite (= propositionnelle) de 2SA, qui lui indique donc encore exactement 11 ou 12 points HL. Il additionne et a) passe avec 12 ou 13H, b) dit 3SA s’il a 14H ou 15HL. Vous avez trouvé le bon contrat. Ici, l’échelle des enchères en fonction des points du répondant est, comme au paragraphe précédent, facile à reconstituer :
– 0 à 10H(L) : Passe (on sait qu’il n’y aura pas de manche…).
– 11 ou 12HL exactement : 2SA, enchère limite. On est sûr qu’il n’y a aucun fit majeur, et la main est régulière (4333, 4432 ou 5332). C’est une enchère sans saut, et elle n’est pas forcing : l’ouvreur peut passer.
– 13 à 17HL : 3SA directement.
3°) Sans majeure, vous songez à SA : Inversons la teneur des Piques et des Trèfles dans votre main de répondeur. Sur l’ouverture d’1♦, par exemple, vous n’avez pas de fit, pas de majeure à annoncer, et une main régulière (rappel : 4333, 4432 ou 5332). Vous voulez donc proposer SA. Avec 11H, on peut atteindre 3SA si votre partenaire n’est pas minimum. Remarque : on peut également atteindre 3SA si vous n’aviez que 6 points, mais à condition que votre partenaire ait ouvert d’1♦ avec 19 points, ce qui est possible… Par analogie avec les démonstrations précédentes, l’enchère limite se fait également avec 11 ou 12HL exactement. La seule différence avec le paragraphe précédent, c’est que vous ne pouvez pas « laisser tomber » votre partenaire avec 6 à 10 points (cf. remarque précédente). On a donc maintenant l’échelle suivante :
– 0 à 5HL : passe (remarque, avec 5HL, on doit répondre si on peut « glisser » une couleur au niveau de 1 : ici, on ne peut pas).
– 6 à 10HL : 1SA (= soit main régulière, soit 1SA « poubelle », cf. cours).
– 11 ou 12HL exactement : 2SA (enchère à saut), main toujours régulière (4333, 4432 ou 5332) sans majeure 4ème, non forcing.
-13 à 16HL : 3SA directement, main toujours régulière sans majeure 4ème. Remarque : ce n’est pas un arrêt…
Remarque importante et intéressante : Une raison supplémentaire de se permettre de faire une enchère limite est que : posséder 11 ou 12 points met le total des points de la paire à 23 ou 24 au moins. Le contrat au niveau de 2SA n’est donc pas en danger, permettant ainsi de « risquer » cette enchère. Sur une ouverture majeure, on estime que l’existence d’un fit rajoute en moyenne 2 points D à l’ouvreur, ce qui permet d’atteindre les 25 ou 26HLD fatidiques pour que le contrat limite au niveau de 3 ne soit pas en danger. C’est le principe, dans tout le système d’enchères, des enchères propositionnelles limites.
EN RÉSUMÉ : Dans toutes les situations ci-dessus, l’enchère limite indique exactement 11 ou 12 points HL(D). Le simple raisonnement permet de retrouver ces valeurs, mais étant donné leur constance et leur universalité, je vous invite tout de même (pour une fois) à les retenir : onze ou douze, onze ou douze, onze ou…
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